L'ECOLE COMMUNALE
Tous
les enfants du foyer allaient à l’école. Moi, avec quelques autres, nous étions
les moins instruit certainement. Nous n’avions pas de cartable. La salle de
classe était dans la mairie. Dans la même classe, il y avait tous les niveaux
et le maître enseignait tout le monde en même temps.
En
hiver, j’allais à l’école en emportant une bûche pour le poêle qui se tenait au
milieu de la classe. Le midi, on revenait déjeuner au foyer. On était pas très nombreux
et les cuisinières nous mijotaient de bons petits plats. En fait, c’était
surtout pour me faire plaisir à moi. J’étais le petit préféré des cuisinières.
En plus de balayage des feuilles, j’étais capable de passer tout le temps qu’il
fallait pour éplucher les légumes. Lorsque je faisais ces travaux ennuyeux, j’étais
ailleurs. Je repensais à la famille et le temps passer.
Le soir, tout le monde était là. Les grands, ceux qui allaient à l'école à Tours, étaient rentrés.
Comme
je n’avais ni leçon ni devoir, je m’appliquais
à déchiffrer les légendes des illustration de quelques gros livres que j’avais
déniché dans un placard de la salle à manger. Ces gros livres reliés cuir,
relataient les premières expéditions en Indochine. Les gravures représentaient
des choses extraordinaires. J’étais loin d’imaginer qu’il y avait, en
Indochine, des guerriers qui combattaient les soldats coloniaux, les fameux
Pavillons Noirs, des éléphants aussi hauts que les maisons et qu’il poussaient
dans la jungle, des champignons gigantesques et qui explosaient en projetant de
la poudre. Ma curiosité m’encourageait à lire et je commençais à mieux
comprendre le français. d’ailleurs, il était interdit de parler en vietnamien.
En
été, j’aimais bien cueillir et me goinfrer de prunelle. La prunelle était un
fruit qui ressemblait à une petite olive mure. Très sucré lorsqu’il était bien
mure, il était plus souvent acide et acre. Ces arbustes formaient les haies et
tout au long des chemins, on se régalait. Cela nous teintait les lèvres en
violet et des chiasses carabinées. Les grands disaient que les grosses
coulantes nettoyaient les intestins. On en conservait dans du sel. C’était pour imiter la prune salée séchée que
les enfants raffolaient au pays.